« Hollywood Monsters », Fabrice Bourland

Et voilà (enfin) revenu le temps des enquêtes étranges de Singleton et Trelawney, sortes de Coolter et Quincampoix échoués au pays des freaks. À la suite d’une cheville malade, la mise au vert s’impose pour Andrew Singleton. Et pourquoi pas la Californie, son soleil, ses plages, son industrie cinématographique ? On est en 1938. L’Europe bruisse de bruits pas très nets. Aux States, on n’y songe pas encore. D’autant que… une erreur d’orientation et voilà nos deux enquêteurs perdus au bord du Malibu Lake. Un virage et voilà qu’un… truc plein de poil vient s’échouer sur leur capot. Un truc plein de poil bizarrement humain et qui prend la fuite. Un loup-garou ? A-t-on bien vu ? Il n’en fallait pas plus pour nous plonger dans une de ces enquêtes pimentées où les bras droits sont des nains, un journaliste rouquin, où les victimes ont trois seins. Où le désert abrite de terribles secrets. Au fil des pages, on s’enfonce de plus en plus dans une sorte de no man’s land où des fœtus difformes dorment dans le formol. Où des médecins s’amusent à créer… quoi ? Des monstres ?
La nouvelle humanité.
Tout cela est enlevé – comme nos deux héros. Mais ne comptez pas sur moi pour en dire plus.
Amusant, énigmatique, trépidant, un rien surréaliste, cette nouvelle aventure des deux enquêteurs de l’étrange (après Le Fantôme de Baker Street, Les Portes du sommeil, Le Diable de Cristal Palace et Le Serpent de feu), les plonge dans le Hollywood de Tod Browning (ils assistent même à une fête chez le réalisateur en compagnie de Bela Lugosi). On sent que l’auteur s’amuse même si le fond reste grave (un relent d’eugénisme dont quelques notes de bas de page finissent de faire froid dans le dos). Un passé pas si lointain que cela. Et des Freaks bougrement humains.

Par Jean-Pierre Favard, « Le Monde Mateo » (blog), 17 février 2015